
Blandine Legal Dornez s’est engagée à raconter aux lecteurs du Nénuphar,
ses souvenirs de jeunesse à Sainte-Geneviève, son village natal.
Le mois des tempêtes ou, comme disait papa, le mois des petits veaux. Il me semble que nous avions alors plus de tempêtes et de neige dans ces années-là. Il y avait une clôture entre l’étable et notre maison et, en hiver, on ne la voyait pas. À l’école, il y avait une grosse barrière qu’on fermait après les classes. Une année, une copine et moi décidons de lécher la barrière de métal. Je ne l’ai jamais refait. Je pense avoir laissé une partie de ma langue sur le givre.
Nous restions souvent en classe après la fin des cours à cause de ces tempêtes. Ça nous donnait la chance de faire nos devoirs du soir. On aimait ça, parce qu’ensuite on pouvait jouer à des jeux une fois rendus chez nous. Des jeux qu’on inventait sans doute. Comme nos maîtresses, je fabriquais des jeux avec du carton et je m’amusais avec mes petites sœurs et mes petits frères. Je leur faisais écrire et épeler des mots, compter, soustraire, etc. Je rêvais alors d’être institutrice un jour, ce qui n’est pas

arrivé, car mes parents n’avaient pas l’argent requis pour me mettre en pension dans une paroisse voisine où on enseignait jusqu’à la 12e année. Ce n’était pas le cas dans notre petite paroisse de Sainte-Geneviève où il y avait peu d’élèves qui se rendaient jusqu’à la 8e année. Plusieurs élèves devaient arrêter l’école à 12 ou 13 ans pour aider à la maison et sur la ferme.
Aussi, j’aimais la lecture et un de nos vieux voisins passait des livres à mon père, comme Le Titanic, que j’ai lu un hiver et j’ai bien aimé ça. Un autre sur l’Holocauste, mais quand j’ai demandé à papa pour le lire, il m’a répondu « Je préférerais que tu ne touches pas à ce livre, tu es trop jeune. » Il avait raison. Je l’ai lu plus tard, et j’ai vu des films sur le sujet et ce n’est pas facile. Le vieux monsieur en question avait des centaines de livres chez lui. Que j’aurais donc voulu mettre ma main dans sa bibliothèque.

Mars est aussi le mois de la Saint-Patrice et, bien que personne aux alentours n’était de descendance irlandaise, on fêtait quand même cette date à l’école. On aimait déguster de petits biscuits en forme de trèfle et décorés avec du glaçage vert.